Intervention du groupe «Centristes & Démocrates pour Lyon»
Monsieur le Maire, Mes chers collègues,
Peu à peu au fil des dossiers qui nous sont présentés, nous avons un tableau impressionniste des errements qui ont conduit la SACVL dans l’état déplorable où elle se trouve aujourd’hui !
Je remercie Monsieur Brumm et Monsieur Le Faou de m’avoir finalement permis de prendre connaissance de certains rapports d’audit réclamés depuis deux ans et relatifs aux instruments de couverture qui ont mené la SACVL au bord du gouffre.
Afin de faire la lumière sur les pratiques spéculatives de certains groupes bancaires, une « commission d’enquête sur les produits financiers à risque souscrits par les acteurs publics locaux » a été créée le 8 juin dernier à l’assemblée nationale.
Préalablement, une charte de bonne conduite entre les établissements bancaires et les collectivités locales a été signée par les grandes associations d’élus, (mais semble-t-il pas celle que vous présidez ?). Cette charte indique notamment que « les grands axes de la politique d’emprunts et de gestion de dette seront présentés à l’assemblée délibérante par l’exécutif local afin qu’elle définisse la politique d’emprunts et de gestion de dette que l’exécutif doit mettre en œuvre… Elles s’engagent en outre à rendre compte de manière régulière à l’assemblée délibérante des opérations qu’elles ont menées en matière de gestion active de la dette. »
En vertu de cette charte qui constitue un outil supplémentaire de transparence dans le cadre du débat démocratique et au regard des enjeux pour notre Ville, les informations fournies concernant la renégociation des emprunts de la SACVL, pour un total de 98 M€ et garantis à 100% par la ville sont insuffisantes.
Selon vos rapports, l’objectif de ces renégociations serait de dégager une marge de manœuvre pour améliorer l’autofinancement des opérations de construction en cours. Or, il est précisé que, sauf exception, la durée d’amortissement de ces emprunts n’est pas modifiée : il s’agit de suspendre (ou d’alléger selon les cas) l’amortissement du capital pendant 7 années, assorti d’une augmentation systématique des taux consentis allant jusqu’à 0,6 points, soit un renchérissement de 10%, et beaucoup plus en ajoutant le différé d’amortissement. Tout cela aura un coût global important qui ne nous est pas communiqué, et aura des conséquences fâcheuses sur les comptes de la Sacvl lors de l’amortissement brutal du capital restant dû en fin de période de « reprofilage », soit en 2018 si je compte bien : joli cadeau que vous transmettez à vos successeurs ! Avant cette date, ce sont près de 9 M€ qui devront être amortis entre 2015 et 2017…
S’agissant plus particulièrement de l’emprunt de 18 M€, il est destiné à « couvrir » un emprunt déjà garanti par la ville en février dernier, lequel était déjà destiné à refinancer cinq emprunts antérieurs en cours d’amortissement : il s’agit aujourd’hui d’augmenter leur taux de 0,60 point pour un bénéfice qui n’est même pas défini dans la délibération. La durée des contrats – et donc de l’engagement de la ville – n’est précisée nulle part, ce qui est proprement hallucinant ! La réaffectation de ces emprunts à des travaux de réhabilitation à prévoir en 2013 est incompréhensible, s’agissant de l’aménagement d’emprunts en cours d’amortissement pour des opérations achevées…
J’attire, par ailleurs, votre attention sur les deux grossières erreurs d’addition dans les tableaux qui sont fournis avec la première et la troisième délibération et vous invite à nous préciser si cela affecte les montants présentés au vote.
En conclusion, vous aurez compris que nous voterons contre ces délibérations, notre ville ne pouvant garantir à 100% des montages financiers aussi opaques et porteurs de menaces pour la solvabilité future de la SACVL.
La situation actuelle nous avait été présentée comme largement assainie à la suite de la vente pour 93 M€ d’une partie du patrimoine de la Sacvl. Or, il n’en est rien, car on constate :
- Que dans les comptes dont nous avons eu connaissance, les provisions pour gros entretien ne cessent de diminuer depuis plusieurs années : cet artifice a pour but d’améliorer la situation comptable, mais fait courir un gros risque car les travaux indispensables seront d’autant plus couteux que la vétusté s’accroit.
- L’absence de rigueur dans la gestion des loyers en cours de bail conduit à des réévaluations massives lors des renouvellements de baux qui ont choqué à juste titre ! Certains logements vacants ont vu leurs loyers exploser et atteignent ou dépassent dans certains immeubles les valeurs locatives du privé : oubliée la destination sociale « intermédiaire » de notre SEM, qui imagine récupérer sur les locataires ce qu’elle a dilapidé par une mauvaise gestion.
- Que les montages financiers de certaines grosses opérations engageaient trop de fonds propres, ce qui a aujourd’hui pour effet de fragiliser les chantiers et d’exposer à des plus-values inéluctables lors de la reprise : le chantier de la Duchère est en panne ! La SACVL avait bénéficié en 2001 d’un prêt de 6,5 M€ pour l’acquisition et l’amélioration de l’immeuble dit « des 320 » situé à Balmont. Cet immeuble fait l’objet d’une métamorphose ambitieuse avec remodelage des étages supérieurs et construction d’un large immeuble en pignon par l’architecte Roland Castro, le tout estimé à plus de 28 M€.
Si l’immeuble neuf boulevard de Balmont est en voie d’achèvement, le remodelage des étages supérieurs de la barre 320 est à l’arrêt faute de fonds, les ouvriers ayant déserté et la grue ayant été enlevée. Le chantier, au grand dam des habitants, est abandonné avec un immeuble est coupé en deux, seule une partie ayant été réhabilitée.
Plutôt que de nous soumettre une renégociation opaque d’emprunts, renvoyant le remboursement du capital 7 ans plus tard, avec un renchérissement du taux d’intérêt, il eût mieux valu anticiper le financement de la poursuite des travaux. Qui va subir aujourd’hui les conséquences de la cette mauvaise gestion ? Pas les cadres dirigeants qui ont pris les décisions que nous contestons aujourd’hui. Pas les élus chargés alors de surveiller la société et d’incarner l’intérêt général que la Ville, actionnaire majoritaire, doit représenter. Non, ceux qui subissent les conséquences des graves errements passés sont les locataires, pour la plupart modestes, parce qu’ils voient leurs loyers exploser, parce qu’ils voient leurs travaux différés et leur immeuble se dégrader dans l’indifférence générale et sans aucune information.
Monsieur le Maire, je vous le demande, est-ce digne d’une gestion assainie et de pratiques renouvelées ?
Je vous remercie,
Intervention reprise par LyonMag dans son édition du 5 juillet.