Intervention du groupe « Lyon Démocrate – MoDem »
Monsieur le Maire, mes cher collègues,
Deux mots pour commencer : Merci et Enfin
Merci, tout d’abord, Monsieur le Maire, d’avoir organisé une commission générale afin de faire le point sur ce dossier qui empoisonne depuis de très nombreux mois les affaires municipales lyonnaises.
Enfin, parce que nous espérons enfin avoir un peu d’informations après des mois d’interrogations, de questions pour la plupart restées sans réponse aggravant le sentiment d’inquiétude légitime des lyonnais.
Ne parvenant pas à obtenir d’information de vos services, je me suis donc adressée à nos élus administrateurs de la SACVL, sans aucun résultat à ce jour, hormis un courrier succinct m’informant, à 5 jours de la commission, que les documents d’audit financier réclamés en vain existaient bien, sans toutefois qu’ils ne me soient fournis.
Monsieur le Maire, ces méthodes m’interpellent particulièrement dès lors que si des audits existent, je ne comprends pas la rétention qui en est faite. Aucune raison objective ne peut expliquer leur confidentialité dès lors que :
- D’une part, en s’adressant à la Ville pour obtenir le vote d’un apport de trésorerie de 25 Mo €, la SACVL doit nécessairement et en contrepartie informer correctement le conseil municipal dans son ensemble, en lui transmettant les expertises réalisées et sans se contenter de répondre que les documents seraient déjà en possession des administrateurs.
- D’autre part, les déboires de la SACVL s’étalent chaque jour dans la presse, qui semble mieux informée que vos propres élus !
Surtout, la communication des audits financier et patrimonial, qui m’a été maintes fois annoncée en conseil municipal sans jamais être suivie d’effets, aurait permis de disposer d’une information objective permettant de déterminer la situation réelle actuelle de la SACVL et d’envisager ensemble les solutions permettant de garantir la pérennité d’une société à laquelle les lyonnais sont profondément attachés. Vous comprendrez, j’en suis sûre, que je ne puisse me contenter de simples affirmations au regard de la gravité de la situation, qui vous a d’ailleurs conduit à organiser cette commission générale.
En persistant à refuser de produire ces audits, vous alimentez l’inquiétude de vos élus qui commencent à croire que la situation est encore plus grave que celle qui nous a été sommairement présentée et qui, pour les quelques informations en notre possession, faisait déjà état des difficultés suivantes pour lesquelles nous souhaitons aujourd’hui des réponses précises :
- En premier lieu, des pertes financières de 47 millions d’euros en conséquence d’un emprunt toxique avec une procédure judiciaire actuellement en cours à l’encontre de l’établissement financier,
- En second lieu, des pertes de 600.000 euros dans le cadre de la mauvaise gestion financière de la trésorerie de la SACVL, telle que cela ressort du dernier rapport du commissaire aux comptes,
- En troisième lieu, une multiplication des opérations à risque, très éloignées de la mission première de la SACVL, alors qu’elle aurait dû se recentrer sur la construction de logements à caractère social en cette période de pénurie et de tension locative, plutôt que de jouer au promoteur privé,
- En quatrième lieu, des dérives dans la gestion même du parc locatif ayant conduit récemment la SACVL à procéder brutalement à des hausses de loyers parfois excessives dans certains ensembles d’habitation vétustes,
- En cinquième lieu, un désengagement des copropriétés en difficulté qui devaient justement prochainement bénéficier d’une réhabilitation programmée et laissant les locataires dans des conditions inacceptables lorsque parallèlement la SACVL semble jouer au Monopoly en procédant à des acquisitions sans lien avec son objet social tel que l’achat de la Tour Rose pour 2,6 M€ d’euros,
- Enfin, la vente d’une partie importante de son patrimoine, comprenant plus de 500 logements, parmi lesquels des immeubles situés à Lyon, en dépit de l’engagement de ne céder que des biens situés en dehors de notre ville. Surtout, la SACVL semble continuer à brader son patrimoine en vendant des terrains constructibles, ce qui nous interpelle sur ses besoins de trésorerie puisque les recettes des ventes avoisineraient les 90 millions d’euros auxquels on peut ajouter les 25 M°€ consentis par la Ville, soit 115 M°€ qui devraient pourtant suffire pour faire cesser l’hémorragie, sauf à devoir éponger d’autres opérations déficitaires…
Ces problèmes de méthode sont cependant symptomatiques d’une gouvernance inadaptée de la Ville sur la SACVL.
Monsieur le Maire, mon propos n’est pas de vous stigmatiser et je suis parfaitement consciente qu’en étant maire de Lyon, il ne vous pas possible de vous substituer à l’équipe dirigeante de la SACVL.
Néanmoins, votre responsabilité actuelle consiste à mettre en place les procédures destinées à éviter qu’une telle gabegie ne se reproduise.
Il conviendrait déjà que la SACVL se recentre sur sa mission de service public et revienne à la rédaction antérieure de son objet statutaire de production de logements et éventuellement l’édification d’ouvrages immobiliers pour la Ville, à l’exclusion d’opérations spéculatives de bureaux, d’hôtels…
Par ailleurs, la Ville de Lyon n’est pas à l’abri de nouveaux déboires qui pourraient affecter les autres satellites nombreux qui se sont vu déléguer des missions de service public externalisés sous la forme de sociétés d’économie mixte, d’associations, de régies autonomes…
Une gestion décentralisée des missions de services publics ne sera sécurisée que si elle est assortie de mécanismes stricts de contrôle.
Or, contrôler suppose nécessairement de détenir l’information utile permettant de vérifier l’adéquation du fonctionnement du satellite à ses missions en disposant pour cela des outils et de l’organisation.
Ainsi et sans être exhaustive, un certain nombre de procédures et d’instruments sont à votre disposition pour organiser un contrôle efficient :
- Le contrôle du seul commissaire aux comptes, qui a pour mission de certifier la sincérité des comptes et de déclencher une procédure d’alerte, est légalement obligatoire et nécessaire, mais se révèle insuffisant ;
- Il vous est loisible, si ce n’est déjà fait, de mettre en place un service dédié au sein de la Ville de Lyon, destiné à contrôler les comptes rendus notamment financiers des satellites en vérifiant qu’ils sont suffisamment précis, en étant attentif aux comptes rendus sur la qualité du service, en contrôlant les décisions importantes, en apportant du conseil, en participant à la construction de projections pluriannuelles pour atteindre les objectifs, en vérifiant le respect scrupuleux des processus décisionnels…
- Je vous rappelle qu’il existe, par ailleurs, la révision juridique qui constitue un audit permettant de déceler des facteurs de risques soit en raison de leur matérialisation, soit en raison des procédures, soit en raison des comportements et habitudes ; cette procédure consiste à examiner systématiquement les incidents juridiques de toute nature, à en analyser les causes et à en tirer les conclusions ;
- Enfin, la mise en place d’une analyse stratégique, encore trop peu utilisée par les collectivités, permettrait d’identifier les faiblesses et les risques auxquels peut être confronté le satellite afin de les anticiper et de les neutraliser, dans le cadre d’une réflexion et d’échanges avec des consultants extérieurs spécialisés dans leur domaine d’activité, avec le recours à des audits externes effectués à titre préventif.
Bien sûr et si vous souhaitez aller encore plus loin dans la mise en œuvre des modalités de contrôle dont bénéficient les collectivités sur leurs satellites, je reste à votre disposition pour vous apporter ma modeste expertise dans ce domaine. Si vous estimiez que l’arsenal juridique est insuffisant, je suis même disposée à vous assister pour l’élaboration d’une proposition de loi que l’éminent parlementaire que vous êtes soutiendrait devant le Sénat. En ma modeste qualité de native, citoyenne et désormais élue lyonnaise, c’est avec sincérité que je vous propose ma participation.
Intervention reprise par Mag2Lyon (édition du 13 avril)