Numérisation et mise en ligne du fonds ancien de la Bibliothèque Municipale de la Ville de Lyon par Google

Intervention de Christophe Geourjon lors du conseil municipal du 11 juillet 2008 au nom du groupe « Lyon Démocrate – MoDem »

Monsieur le Maire,

Notre groupe constate avec satisfaction la volonté de la Ville de Lyon de rendre accessible via des moyens modernes le fond ancien de notre bibliothèque municipale.

Avec ce marché, Google obtiendrait le premier contrat d’importance dans la sphère francophone, la première bibliothèque ayant tenté l’expérience étant la bibliothèque cantonale et universitaire de Lausanne, pour 100.000 ouvrages seulement et une durée limitée à deux ans.

La technologie évolue à grande vitesse, et l’obsolescence des méthodes et des formats informatiques est si rapide que bien des efforts du passé sont d’ores et déjà perdus. Aussi la durée du marché nous pose problème (10 ans d’exclusivité). Les expériences de la Bibliothèque Nationale et son projet Gallica auraient dû appeler à une plus grande prudence ! En effet, l’expérience de numérisation Gallica 1 lancée en 1999 par la BNF a donné des résultats quasi catastrophiques en termes de quantité et de qualité des documents numérisés. Sept ans plus tard, la BNF lance Gallica2 en améliorant sensiblement la qualité et donc l’utilité de la mise en ligne des documents anciens.

Le projet de marché interdit sauf marginalement le recours à d’autres solutions de numérisation pendant la durée du marché, soit 10 longues années pendant lesquelles les initiatives nouvelles ne manqueront pas, notamment dans le cadre de coopération inter-bibliothèques ou inter-centres documentaires. Cette clause d’exclusivité de l’article 24 est extravagante, d’autant plus que les « ouvrages objet du marché » ne sont pas clairement définis : est-ce les 450.000 qui devront être numérisés ou est-ce la totalité des 1.342.000 ouvrages patrimoniaux ? Cette clause pourrait ainsi interdire à la BML de participer à d’autres expériences européennes de numérisation en grandes quantités.

Pour poursuivre, je souhaite reprendre quelques extraits du ‘Cahier des clauses techniques particulières’ qui nous posent problème :

Article 16 :
Seulement 25 000 ouvrages bénéficieront de la fourniture par Google des métadonnées. Or ces informations sont indispensables à une exploitation informatique efficace des fichiers numérisés. Par ailleurs, le prix unitaire de fourniture des métadonnées fixé dans le marché est une porte ouverte à toutes sortes de réclamations de la part du prestataire.

Article 24 :

  • « Le titulaire accepte que la BML puisse conclure des accords de partenariats avec d’autres bibliothèques ou organismes culturels, éducatifs ou de recherche à but non lucratif lorsqu’ils permettent une consultation des fichiers par lui numérisés dans le cadre de la bibliothèque numérique propre à la BML et sans transmission physique des fichiers au partenaire »

Dans le cadre d’un éventuel partenariat avec d’autres bibliothèques (nous en reparlerons plus tard) les fichiers numérisés ne peuvent être centralisés ce qui complique grandement la constitution d’une bibliothèque numérique au niveau national ou francophone.

  • « Le titulaire autorise la BML à conclure des partenariats non-commerciaux plus larges avec d’autres organisations, sous réserve de son accord préalable express »
  • « La Ville de Lyon a le droit d’utiliser, à sa seule discrétion, les fichiers numérisés pour créer sa propre bibliothèque numérique, en tout ou partie. Dans cette hypothèse, La ville de Lyon s’engage à mettre en place des mesures techniques restreignant l’accès automatique à des pans entiers de sa bibliothèque numérique ».

Que veut dire à des pans entiers de sa bibliothèque ?

  • « La ville de Lyon ne devra ni partager, fournir, accorder de licence ou vendre les fichiers numérisés ou toute ou partie de sa bibliothèque numérique à des tiers sans l’accord préalable écrit du titulaire ».

Y compris à des fins non commerciales ?

D’autre part, SCANNING SOLUTIONS, SARL est une société unipersonnelle créée en mars 2007 et qui n’a publié à ce jour aucun résultat. La cotraitance avec une société de droit irlandais et de taille mondiale peut paraître artificielle et inciter à la prudence, tant elle ressemble à un montage juridique opportuniste. Son dirigeant John Herlihy n’est autre que le directeur marketing de la branche irlandaise de Google.

En parallèle de ce dossier, la Ville de Lyon est-elle engagée, ou souhaite-t-elle prendre l’initiative, de fédérer la création d’un portail Internet des bibliothèques municipales Françaises offrant un accès à l’ensemble du patrimoine numérisé de ces bibliothèques ?

En conclusion, le marché est beaucoup trop volumineux et insuffisamment évolutif pour ne pas risquer les déconvenues liées à l’évolution rapide des acteurs et des technologies dans ce domaine. Nous risquons en adoptant le marché en l’état de condamner la bibliothèque municipale de Lyon à l’inaction. Nous demandons le réexamen des clauses potentiellement litigieuses, et donc à ce titre un report de la décision.

Je vous remercie,

Vu la non-réponse de l’exécutif à nos interrogations notre groupe à décidé de voter contre ce rapport. En effet, à partir des informations que nous avons, nous estimons que certaines clauses de ce contrat peuvent être paralysantes pour la Bibliothèque municipale de Lyon.

.

Intervention partiellement citée dans l’édition du 11 juillet de Métro

Pour plus d’informations sur ce dossier vous pouvez consulter les débats qui ont déjà eu lieu sur ce sujet en novembre 2006 …

Ce rapport nous a permis d’apprendre que, selon Gérard Collomb, le conseil municipal de Lyon n’est pas un lieu de débat (intervention de Monsieur le Sénateur-Maire juste avant le vote…).

Nous pensions justement le contraire!

Pour nous élus Démocrates, le conseil municipal devrait être un lieu de débats constructifs pour bâtir le Lyon de demain.

Restons en contact !

2 Replies to “Numérisation et mise en ligne du fonds ancien de la Bibliothèque Municipale de la Ville de Lyon par Google

  1. Je cherche à lire le contrat de convention qui doit être public ? Passé entre google inc et la Bibliothèque Municipale de Lyon. Ou le trouver ?
    Merci

  2. Le contrat n’est pas sur le site internet de la ville : on y trouve les délibérations et les débats concernant ce sujet en séance du conseil municipal :
    DEBAT – N° 2008/0447 (séance du Conseil municipal de 2008)
    DEBAT – N° 2006/7204 (séance du Conseil municipal de 2006)
    Les élus ont eu en mains la convention pendant la discussion en commission. Le contrat est (peut-être) disponible au service documentation de la ville (voir mairie annexe)

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